Vers 1150, Macé du Plessis décide de construire une abbaye à Saint Georges sur Loire pour les chanoines régulier de l’ordre de Saint Augustin. Il fait don de terres, contigües à l’église paroissiale, plus ancienne, pour y faire bâtir maisons et jardins. Il offre aussi douze fermes situées dans un environnement proche. Les seigneurs locaux donnent également des bois et des domaines ainsi que des rentes et des collectages de dimes, impôts sur les récoltes et les productions. Les seigneurs de Brie et de Serrant vont également offrir des métairies. Au cours des années, les revenus de l’abbaye deviennent de plus en plus importants.
Chanoine génovéfain en habit de choeur d’été
Les abbés, chefs de la communauté constituée d’une douzaine d’hommes, sont choisis par les religieux jusqu’en 1534. A partir de cette date, l’abbaye tombe en commende. Cela signifie que n’importe qui, un religieux et parfois même un laïc, gère l’abbaye sans être obliger d’y habiter. Les chanoines tenteront de résister à ce mode de gestion : ils constituent le petit couvent, ou petit chapitre, et acquièrent collectivement des biens afin de louer pour garantir une rente.
En 1624, la réforme de l’ordre de Saint Augustin est décidée afin de lutter contre les dérives mercantiles de la gestion des communautés religieuses. Le pape Grégoire XV missionne le cardinal de la Rochefoucault de moderniser les règles de vie des chanoines. Cette demande est motivée par la poussée du protestantisme qui prône des valeurs strictes et une rigueur religieuse. Un supérieur sera alors élu à la tête des réformés. On impose une tenue sobre aux religieux et une prudence sur le recrutement des novices. La réforme est actée le 27 avril 1624, à l’abbaye royale de Saint Geneviève à Paris.
Les Réformés vont alors parcourir la France, d’abbayes en monastères, pour introduire la Réforme. Celle-ci arrive à l’abbaye de Saint Georges le 9 juillet 1658. Jacques de Grignan, évêque d’Uzès et abbé de Saint Georges signe la transaction avec François Blanchard, abbé de Sainte Geneviève.
La transaction ne fait aucunement allusion à une réforme de la vie religieuse. Elle acte seulement une répartition des revenus et des charges. Jusqu’alors, les abbés percevaient la totalité des revenus de l’Abbaye. Les chanoines réguliers ne recevaient que les revenus de leur propre patrimoine, des biens du petit couvent et des chapelles claustrales. L’abbé reconnaît désormais l’existence du Petit Couvent et y affecte 2000 livres chaque année de ses propres revenus. Il paie également les religieux responsables des offices : le curé, le sous-sacriste et le chantre.
L’abbaye en 1699
L’abbé garde tous les revenus des prieurés et des chapelles. Il se décharge de tout l’entretien courant des bâtiments, ne conserve que les réparations du gros œuvre. Les chanoines assurent collectivement l’entretien courant des bâtiments et les frais liés aux offices religieux. Tous leurs revenus doivent être mis en commun. Ils doivent donc renoncer aux revenus des chapelles claustrales et autres rentes.
Cette répartition va conduire à une lutte continuelle entre l’abbé et les chanoines. Par exemple, en 1672, l’abbé Jacques Adhémar de Grignan, décide de couper une partie des bois de Boyau pour en faire une terre labourable. Les chanoines perdent une source importante de bois de chauffage et négocient une compensation annuelle de 200 livres que l’abbé devra prendre sur ses propres revenus. Pour couvrir ces dus, l’abbé cède des propriétés aux chanoines : des métairies, des chapelles et des prieurés deviennent ainsi les biens de la mense conventuelle.
La transaction prévoit également que 10 chanoines habitent l’abbaye. En réalité, ils ne sont que sept ou huit ce qui contrarient les seigneurs du Plessis Macé qui ont fondés l’abbaye. Ainsi Guillaume Bautru, propriétaire du château de Serrant va exiger l’application de la transaction. Les religieux lui répondront que les revenus de l’abbaye sont insuffisants pour survenir aux besoins de 10 personnes.
Les relations entre l’abbé et les chanoines se dégradent encore au début du XVIIIème siècle. En 1695, quand Jean Louis Caton de Court est nommé abbé, une expertise estime à plus de 20 000 livres les réparation nécessaires, somme que lui remet son prédécesseur Jean-Baptiste Lully qui a poursuivi la construction de la nouvelle maison conventuelle(l’actuelle mairie). Mais en 1715, Caton de Cour est ruiné et les travaux ne sont pas réalisés : il a fait construire le palais abbatial et a dépensé sans compter. Il organise une loterie, vente aux enchères pour combler ses dettes. Les chanoines obtiennent que seul un tiers des biens aillent à l’abbé. Un autre sera affecté à l’entretien des bâtiments et le dernier aux chanoines qui pourront en disposer librement. Quand Nicolas de Vaubrun devient abbé, les travaux sont encore estimés à près de 15 000 livres. L’abbé intente un procès à Charles Roger, héritier de Caton de Cour. Sans grand succès : à la mort de l’abbé de Vaubrun, le montant des réparations est estimé à 30 000 livres.
Yriès de Beaupoil de Saint Aulaire, son successeur nommé en 1746, traine au tribunal l’héritière de Nicolas de Vaubrun, la duchesse d’Estrée. Elle est condamnée en 1747 à financer les réparations. Peut-être est-ce pour cela qu’elle vend le château de Serrant à Antoine Walsh. En 1748, elle sera déchargée de sa condamnation.
En 1766, Luc de Salles devient abbé de Saint Georges. Il constate que la réforme de 1624 est loin d’avoir été appliquée : les abbés ont continué de percevoir l’ensemble des revenus de l’abbaye, les chanoines n’ont pas mis en commun leurs revenus notamment leurs chapelles claustrales. Vont s’en suivre de nombreux procès entre les chanoines et l’abbé. Mais Luc de Salles obtiendra l’application de la Réforme.
Les différends financiers se poursuivront cependant jusqu’à la Révolution, les chanoines accusant le prieur Gournay d’avoir détourné l’argent du couvent pour financer les réparations de son propre prieuré !
Source :Abbaye de Saint Georges sur Loire, Le temporel, Denis Mercier
La liste des abbés est difficile à établir. Les noms et les dates varient souvent selon les sources.
Abbé | Année de nomination |
Herbert | 1152 |
Jean | 1163 |
Daniel | 1177 |
Guillaume I | 1180 |
Guérin | 1189 |
Mathieu | 1202 |
Guillaume II | |
Giraud | |
Pierre | 1275 |
Robert Thomas | 1290 |
Nicolas de Aula ou de la Salle | 1334 |
Jean Mabier ou Mahier | 1347 |
Maurice Mernotte ou Mervotte | 1356 |
Nicolas de Chazé | |
Hugues | 1363 |
Guillaume Guillopé | 1389 |
Pierre d’Andigné | 1400 |
Guillaume Brient | 1410 |
Pierre Bonhomme | 1439 |
Maurice de Saint Quentin | |
Auger de Brie | 1445 ou 1468 |
Antoine de Brie | 1499 |
Payen ou Péan de Brie | 1504 |
Louis Samson | 1517 ou 1522 |
Auger Samson | 1526 |
Mise en commende de l’Abbaye | |
Jean ou Jehan Chauderon | 1534 |
Guillaume Millet | 1547 |
Antoine Millet | 1574 |
Jean de Vassé | 1588 |
Silvin Thabault | 1594 |
Antoine Pot de Rodes | 1605 |
Nicolas Pot de Rhodes | 1610 |
Nicolas Tudert | 1613 |
Gabriel Boylesve de Malnoue | 1650 |
Roger d’Aumont | 1651 |
Jacques Adhémar de Grignan | 1654 à 1674 |
Louis Joseph Adhémar de Grignan | 1681 |
Jean Baptiste de Lully | 1687 |
Jean Louis Caton de Court | 1695 |
Nicolas de Vaubrun | 1732 |
Yrieux ou Yriex De Beaupoil de Saint Aulaire | 1747 |
Luc de Salles | 1766 |
Jean François de Maillan | 1787 |