Signature de Pierre-Eloi Lalesse
Pierre Eloi Lalesse est né le 1er décembre 1752 à Barbonne, petit village de la Marne. Sa mère Marie Angélique Diguelon meurt 21 jours plus tard probablement des suites de couche. Elle a 45 ans et a enfanté 15 fois en 23 ans et au moins sept de ses enfants sont décédés avant d’atteindre cinq ans. Pierre Eloi grandit donc avec son père, Pierre, laboureur. Ses frères et sœurs sont plus âgés : Pierre Antoine, né en 1736, est receveur général du district de Melun. Pierre Nicolas, né en 1738, est marchand.
Pierre-Eloi, lui, s’engage dans une carrière religieuse : il entre à l’abbaye de Saint Geneviève à Paris le 3 novembre 1774. D’abord étudiant à Notre Dame de Ham au nord de Reims, il parcourt la France, Provins, Chartres, Chateaudun, devenant sous-diacre en 1778, puis diacre et prêtre en 1779 avant d’arriver à l’abbaye de Saint Georges sur Loire le 14 mai 1781. Il y exerce la fonction de vicaire jusqu’en 1784. Il est alors nommé prieur-curé de Mée en Mayenne, paroisse sous l’autorité de l’abbaye de Saint Georges sur Loire, suite à la résignation d’Augustin Gournay, qui revient à l’abbaye de Saint Georges sur Loire pour assurer la fonction de prieur. Arrivé le 9 novembre 1784, il n’y reste que peu de temps : dès le 27 janvier 1785, il est nommé prieur-curé à Villemoisan, paroisse dépendant de l’abbaye Toussaint d’Angers, suite au décès de François Dubois. Pierre-Eloi envoie sa réponse favorable deux jours plus tard mais son dossier s’égare dans l’un des quinze bureaux de Rome. Il doit attendre le 14 juin 1785 pour rejoindre sa nouvelle paroisse.
Il est encore à Villemoisan quand éclate la Révolution. Le 27 novembre 1790, les prêtres doivent prêter serment à la constitution civile dans les termes suivants : « Je jure de veiller avec soin sur les fidèles de la paroisse [ou du diocèse] qui m’est confiée, d’être fidèle à la nation, à la loi et au roi, et de maintenir de tout mon pouvoir la Constitution décrétée par l’Assemblée nationale et acceptée par le roi. » Pierre-Eloi Lalesse refuse d’abord de prêter serment puis concède en y mettant de telles restrictions que son serment est annulé. Il loge à l’abbaye Toussaint d’Angers jusqu’en mai 1792 ; il est alors incarcéré au Séminaire d’Angers. Son frère, Pierre-Antoine, trésorier de Melun, réclame son transfert dans son district. Sans succès : Pierre-Eloi est déporté en septembre 1792, en Espagne. 264 ecclésiastiques angevins et 144 prêtres manceaux, tous réfractaires à la Révolution, prennent la route de Nantes, le mercredi 12 septembre. Les religieux sont encordés et marchent sous la surveillance de 400 gardes nationaux, subissant la chaleur et les quolibets des villageois. Sur le chemin de la déportation, le convoi s’arrête le temps d’une halte de trois heures à Saint Georges sur Loire. On offre du pain et du vin aux prisonniers qui dînent dans le cloître : un bien étrange retour pour Pierre-Eloi qui a quitté ces lieux depuis plus de sept ans.
Eglise Saint Pierre de Mée
Prieuré de Mée
Le 20 septembre, le convoi est à Paimboeuf. Pierre-Eloi Lalesse embarque sur le navire la Didon pour une traversée particulièrement difficile : 184 religieux sont entassés dans un espace exigu, subissant la tem^pête, nombreux d’entre eux souffrent du mal de mer. Il est débarqué à Santander. En janvier 1793, il est à Compostelle où plusieurs prêtres réfractaires ont trouvé refuge : il y restera jusqu’en 1799. En 1800, il retourne à Villemoisan. Après le Concordat établi par Napoléon Bonaparte et le pape Pie VII en 1801, qui permet aux prêtres catholiques de retrouver une liberté de culte, Pierre-Eloi Lalesse est maintenu dans sa paroisse. Le prêtre porte toujours le grand habit blanc des chanoines réguliers jusqu’à son décès le 24 décembre 1827, à l’âge de 57 ans.
Sources :
Les derniers chanoines de l’abbaye de Saint Georges sur Loire, Denis Mercier
Le clergé du département de Maine et Loire pendant la Révolution, E. Queruau-Lamerie, 1889
Les paroisses du diocèse d’Angers avant le concordat, Anjou Historique volume 4 1903, p 472
Prosopographie génovéfaine : Répertoire biographique des chanoines réguliers de Saint Augustin de la congrégation de France (1624-1789), Nicolas Petit, 2008