Saint Georges Patrimoine

Le petit patronage

1944 : Seconde Guerre Mondiale

activités physiques au patronage

activités physiques au patronage au début du XXème

Situé sur la terrasse sud de l’Abbaye, le billard des moines qui a longtemps abrité la bibliothèque municipale était connu jusqu’aux années 1970 comme le “petit patronage”. La maison conventuelle, l’actuelle mairie, avait été durant le XXème siècle partiellement abandonnée. Seule l’aile nord, aujourd’hui détruite, qui s’avançait sur la place, était occupée par les services municipaux. Les prêtres de la paroisse étaient hébergés dans la partie ouest de l’Abbaye.

Le petit patronage était surtout le domaine du vicaire qui y organisait les activités concernant les jeunes garçons de la paroisse. C’est ainsi que tous les jeudis après-midi, il proposait des jeux et des sorties en plein air avec les scolaires du bourg. Cela donnait du temps libre aux mamans qui savaient leurs enfants en bonnes mains. Pour les plus grands, ados et jeunes hommes, l’abbé animait des réunions, souvent le soir après la journée de travail.

Pendant la guerre 1939-1945, nous eûmes le bonheur d’être guidés par un vicaire passionné de musique qui avait échappé à la captivité. Il ne se contenta pas de faire survivre la fanfare qui existait depuis de nombreuses années, il mit en place une harmonie qui comprenait une cinquantaine de membres, pour la plupart des jeunes mais aussi quelques anciens et même trois très bons musiciens descendus de Paris pour essayer de satisfaire un peux mieux la faim qui les tenaillait dans la capitale en ces temps de restrictions et de cartes d’alimentation.

Nous les plus jeunes avons été dans l’obligation d’apprendre les rudiments de solfège, indispensables avant qu’on nous confie un instrument de musique. Trente leçons furent nécessaires à raison de trois par semaine. Ces sorties nocturnes étaient tolérées par les soldats allemands qui faisaient leurs rondes pour que le couvre-feu soit respecté. Ils ne faisaient que de rares apparitions au cours des répétitions parce qu’ils voyaient un rai de lumière passer par la fenêtre. Ils nous obligeaient alors à bien tirer le rideau de camouflage.

L’harmonie Saint Stanislas pendant l’Occupation

Donc, jusqu’à la libération nous n’avons cessé de progresser dans l’apprentissage de la musique. Nos n’avions guère l’occasion  de faire connaître cette progression à la population à part les dimanches de fêtes où nous produisions quelques morceaux à la sortie de la messe sur la place de l’église et aussi lors des kermesses organisées pour permettre d’envoyer des colis aux prisonniers de guerre.

En 1944, lorsque les troupes libératrices débarquèrent en Normandie, notre chef décida de nous faire répéter « La Marseillaise » malgré la présence de l’occupant qui pourtant n’est jamais intervenu pour interdire cette téméraire initiative. Il est difficile d’admettre qu’il n’entendait rien, mais sachant ce qui l’attendait, ne faisait-il pas la sourde oreille ? Toujours est il que dès que nous fûmes libérés, un défilé vers le parc du château de Serrant fut organisé pour aller mettre le feu à un bucher installé par des prisonniers russes cantonnés dans des baraquements près du château. Ils avaient surmonté ce bûcher d’une grande caricature de l’ennemi Hitler. Et c’est joyeusement qu’une ronde franco-russe fut organisée spontanément autour de ce feu de joie. Ce jour là, nous avons vu monsieur le Maire, Maurice Lair, et monsieur le Curé, pour la première fois, dans la même voiture automobile. Nous, les jeunes, espérions voir enfin, avec la fin de la guerre, la fin des querelles de clocher.

Avant de partir pour ce défilé mémorable, sur la place de la mairie, nous avons « exécuté » (dans tous les sens du terme) La Marseillaise avec un tas de fausses notes tant l’émotion était grande !

Témoignage d’Eugène Mercier