Saint Georges Patrimoine

La fontaine de la place de la mairie

1870 : De l'Empire aux années folles

fontaine de la place de la mairie

La fontaine de la place de la mairie en 2012

Au XIXème siècle, l’histoire de Saint Georges est ponctuée de problèmes hydrauliques. Les besoins en eau potable deviennent de première importance. Le village, construit sur un coteaux rocheux, possèdent des fontaines : la fontaine Bénêt, encore en activité aujou’dhui, à l’entrée est de la commune, la fontaine Boussion, aujourd’hui disparue. Les pompes situées rue des parements et rue de Cumont, sont les témoignages de ces points d’eau. De nombreux puits étaient aussi présents. Pourtant, ce n’était pas suffisant pour répondre aux besoins en eau d’une population avoisinant les 2 500 habitants.

Le 13 février 1870, le conseil municipal, présidé par son maire, Jean-Charles de la Tourette, décide le creusement d’un puits public, place de la mairie. Dès le 24 avril, les lots de travaux sont adjugés à Louis Sauvestre, entrepreneur résidant rue de Brissac à Angers et à Joseph Androuin, plombier à Saint Georges pour un montant total de 1 329,40 francs. L’architecte angevin Tendron, dirigera le chantier.

Deux ouvriers se mettent au travail : ils se nomment Gasnier et Louis Leblond. Nous connaissons leur identité car ils ont laissé des factures de restauration chez René Tudoux, “débitant” de Saint Georges, que celui-ci adresse à la municipalité. Le 31 mai 1870, les deux ouvriers ont ainsi consommé 3 litres de vin, 4 cafés et de l’eau de vie “pour la goutte”.

Malgré les efforts des deux hommes, l’ouvrage n’avance guère : la roche, très dure, résiste. En septembre, l’entrepreneur Sauvestre demande une augmentation : il a dû payer des réparation d’outils cassés aux frères Lusson, forgerons. Il précise au préfet : “Il fallait tout faire sauter par la mine, avec beaucoup de difficultés !”.

Le puits est prévu d’un diamètre extérieur de 4 mètres et intérieur de 3,5 mètres, et d’une profondeur de 15 mètres en pierres maçonnées vers le haut et sèches ensuite.

délibération du conseil municipal en 1871 concernant la fontaine de la place de la mairie

Délibération du conseil municipal en 1871 concernant la fontaine de la place de la mairie : le maire Louis Monprofit fait part de sa crainte de ne pas voir Sauvestre finir le chantier.

candélabre de la fontaine de la place de la mairie

la borne est surmontée d’un candélabre, c’est-à-dire d’un couronnement évoquant une torche telle que l’avait souhaité l’architecte Tendron

Les relations de l’entrepreneur avec l’architecte Tendron sont tendues. Ce dernier lui reproche de ne jamais être sur le chantier. L’entrepreneur semble avoir des soucis financiers. Il déménage à de nombreuses reprises la même année. En 1871, le nouveau maire de Saint Georges Louis Monprofit pense à le dessaisir du chantier qui n’a pas avancé depuis septembre 1870. Sauvestre s’engage à finir de creuser le puits prévu à condition d’être rémunéré à hauteur de 160 francs le mètre creusé au lieu de 150 initialement prévu. Le conseil municipal accepte.  Mais une autre question inquiète l’architecte Tendron : l’eau du puits vient-elle d’une source ou bien des égouts des maisons voisines ? Pour le savoir, il faudrait vider le puits…

Marie Hylas Suaudeau devient maire de Saint Georges et récupère le dossier. Il apprend qu’une partie des travaux de 1870 ont été sous-traités à un certain Lucas, puisatier de Saint Martin du Fouilloux. Des démêlés s’en suivent entre l’entrepreneur et le sous-traitant. La chambre syndicale des entrepreneurs d’Anjou finit par statuer : Sauvestre ne peut poursuivre le chantier.

Le 22 Mai 1873, après trois ans de travaux, le conseil municipal décide de confier la poursuite à Mathurin Merlet, de la rue Tuliballe à Angers. Mais celui-ci va aussi connaître des déboires. Le décès de sa femme va d’abord perturber la conduite du chantier. Puis, c’est l’architecte Tendron qui viendra contester son travail. Le puits atteint finalement 20 mètres.

Un nouveau problème apparaît : la pompe initialement prévue par le plombier Androuin ne convient plus à cette profondeur de forage. L’architecte Tendron a découvert lors d’une exposition à Angers ce qui lui paraît être l’équipement idéal : “une pompe en cuivre à deux corps, borne en fonte, dallage sur le puits en granit rose bleu de Bécon” équipé du “système Piau”. Louis Joseph Androuin réalise l’installation en 1874 pour constater qu’elle ne fonctionne pas…

Marie-Hylas Suaudeau se plaint à l’architecte Tendron qui ne donne plus signe de vie. Son fils parle de voyage, ignorant la nouvelle adresse de son père. Même au décès de son épouse, Tendron ne réapparaît pas. Toujours est-il qu’il faut remplacer la pompe Piau par une autre, plus simple, aspirante, à colonne et à balancier.

Blot, mécanicien à Angers, doit superviser les travaux. Il envoie une description précise du matériel nécessaire au fournisseur Lizolle-Rousseau, installé rue Saint Julien à Angers. Il commande “une pompe élévatoire dont le corps de pompe doit être situé à 10 mètres en contrebas du sol, mais à cette profondeur le corps de pompe sera plus bas que le niveau de l’eau”. Il faudra donc construire une sorte d’échafaudage constitué de pièces de bois entrecroisées qui permettra les réparations nécessaires et au bout duquel sera fixé le corps de pompe. Le fournisseur garantit sa marchandise pour 5 ans.

Mais le 27 avril 1899, le conseil municipal se plaint : la pompe ne fonctionne plus régulièrement. Le problème est d’autant plus préoccupant que la sécheresse sévit et que les fontaines commencent à se tarir. On fait de nouveau venir des ouvriers d’Angers. En août, la pompe fonctionne de nouveau. Mais le duc de la Trémoille, propriétaire du château de Serrant et membre du conseil municipal, “a fait faire à ses frais, l’analyse chimique et bactériologique de l’eau du puits”. Les résultats ne sont pas bons. Il convient d’avertir la population du bourg qu’il est nécessaire de faire bouillir l’eau de la fontaine de la mairie avant de la consommer.De nouveaux travaux sont nécessaires pour que les eaux usées ne se mélangent pas avec celles du puits.

Le 17 juillet 1900, le général Faugeron, maire de la commune, annonce que les pompes de la commune ne seront mises à disposition que de 6 à 8 heure et de 17 à 19 heure. La sécheresse ne permet plus un usage intensif.

Il faudra attendre 1955 et l’arrivée du service d’eau potable avec pompage dans la nappe phréatique de la Loire pour que tous ces problèmes soient résolus.

la fontaine benet

La fontaine Benet à l’entrée est du village